La dame du Moulin Bleu

Cette lettre est un moment de déclaration, celle d’une histoire
Qui se perd dans le fond d’une impasse, oubliée de ma mémoire
Je rédige ces lignes, comme un testament, je me livre à vous,
Je dévoile mes sentiments à celle qui me lira, pour tout
Ces moments de solitude, de ces instants vidés de tout sens,
Je sens monter le désir d’une fuite en avant, cette sentence
Prononcée contre moi fût la dernière étape d’un parcours
Chaotique d’un enfant gâté par les détours
D’une vie compliquée, mais si riche en amour.
Je me suis inscrit au pôle d’une hémisphère inconnue
Pour te retrouver, te serrer contre moi, mon âme mise à nue
Par tes caresses intenses sur ma peau, et tes baisers ardents
Sur mes lèvres salées, je me sens libre maintenant.
Alors l’aube nouvelle, ère d’une nouvelle existence,
Me rapproche plus encore de cette distance qui me sépare
De toi, de cet instant où le flash s’est déclenché, évidence
D’une minute inavouée, je me perds, toi tu prépares
Mes dernières lignes de vie, car tes mains expertes ont détruit
Le peu d’honneur qu’il me restait, sous ce lampadaire gris
Qu’une lumière blafarde reflète sur l’asphalte, je tenais
Encore un peu, ce qu’il me restait de dignité et de destin.
Toi, tu t’échappais par la grande porte, jour de festin
Pour ces acariâtres acidulées d’une ère nouvelle,
Me voici surplombant l’échafaud, puis cette échelle
Qui se dérobe au pied du poteau, je glisse, trébuche, l’acier
Froid de la lame se présente comme une belle amie,
Elle me regarde, se prend une grande bouffée d’air pur, alliée
De ces bourreaux, elle se réjouit déjà de ce festin de roi, la pluie
Essuie les premières gouttes de sang qui perlent sur mon front.
La nuit est si belle en ce début de printemps, ce sont les monts
Et collines qui s’illuminent pour saluer mon départ,
Car annoncé, décrié et écrit, il se fera maintenant très tard ce soir,
Je suis passé par ces écrits, tout simplement pour vous dire au-revoir.
© Michel Cosentino